jewisheritage

Ted Lapidus (France)

Créateur et styliste français

Styliste en vogue des années 1960, il adorait les femmes, qui le lui rendaient bien.

Ted Lapidus qui révolutionna les années 1960 en habillant les femmes comme il les aimait dans la vie, dans la rue et non pas dans les salons ou sur papier glacé, vient de nous quitter. Il s'est éteint à la clinique de Mougins après s'être retiré à Cannes il y a une quinzaine d'années. Fortune faite ? Sans doute : la mode actuelle lui doit tout. Sa décontraction et son androgynie. Sa modernité. Ted Lapidus fut le couturier le plus moderne des Trente Glorieuses. En 1965, tailleur hors pair, cet inconnu lance le style unisexe et proclame la mobilisation générale de la femme à grand renfort de pardessus d'officier, de boutons dorés ciselés et d'épaulettes militaires. Les pantalons pattes d'ef sous cabans, Ted les rend soudain populaires. Françoise Hardy addict à Courrèges confirmera la tendance. Bardot, Marie Laforêt, Madeleine Robinson, la duchesse de Bedford seront ses fans. Alain Delon et Vadim, Capucine et Annabel Buffet ses mannequins. Époque étourdissante où ce grand amoureux de la femme escamota les minijupes sous des manteaux d'Il était une fois dans l'Ouest et où le Tout-Paris courait place Victor-Hugo. Il y avait ouvert une boutique commanditée par son copain Charles Aznavour et dirigée par son frère Bernard et sa belle-sœur Claudia. Chez les Lapidus, la famille, c'est sacré !

Ted poète et homme d'affaires. Il vous lisait ses poèmes au dessert et laisse un ouvrage de 700 pages qu'il envisageait de faire éditer prochainement. La technologie n'avait plus de secrets pour cet élève de l'École technique de Tokyo, quand il en sortit en 1949, décidé à révolutionner la mode en lui appliquant les principes de production normalisée. Il réalisera ce rêve en 1963 en s'associant, au grand scandale des puristes de la haute couture, avec La Belle Jardinière, un grand magasin populaire qui lui offrit de diffuser en grande série sa mode masculine et féminine. Personne n'était moins confidentiel que cet homme, aussi visionnaire dans son genre que le fut Pierre Cardin.

Comme Cardin, Ted démarra par un passage éclair chez Dior avant d'ouvrir avec sa jeune sœur Rosette dans son ombre, sa première maison de couture. Rue Marbeuf. Je me souviens de sa première collection. La presse était venue si nombreuse que le podium déborda des salons sur le trottoir, où les journalistes s'installèrent sur des sièges de fortune pour prendre des notes. Un grand couturier venait de leur tomber du 5e étage avec des silhouettes à la Kiraz. On lui fit une ovation. Quand la rue Marbeuf s'avéra trop exiguë, on s'envola au 32 de la rue François-Ier. C'était en 1982. La roue tourna. En 1986, un groupe canadien le rachète, qui le revend en 1989 à Franz Braha, PDG du groupe Paris Eco. Changement de mains en 1990 : la griffe passe entre celles d'Alain Mallard, qui, en 1993 la cède à une filiale du Crédit lyonnais. Ted attire les capitaux. Son affaire est internationalement connue. Mais le nom lourd à partager.

Ce n'est qu'en 1989 qu'Olivier Lapidus réconcilié avec son père prend la tête de la maison. Sous son nom enfin ! Nom magique qu'on ne partage pas.

Quand Rose Mett, la sœur de Ted ouvre sa maison de couture, elle renonce à son patronyme pour un nom créé de toutes pièces, Torrente. Quand son fils Olivier, sorti premier en 1983 de l'école de la chambre syndicale, fait son entrée dans la cour des grands, le droit au nom lui est refusé. Il sera, pendant des années, Olivier L avant de regagner, enfin, son droit au patronyme.lefigaro

Aucun commentaire: